Diariatou Kebe: “En tant que parents, nous devons créer un rapport de force”
Elles sont deux. Elles sont mères et très déterminées. Diariatou Kebe et Fatima Ouassak, toutes deux militantes antiracistes, ont lancé Front de mères, le 15 mars dernier.
Leur objectif ? Veiller ” à l’égalité, la justice et la bienveillance” à l’égard des enfants. Ce mercredi 24 mai, elles organisent les Etats Généraux des Familles, une journée d’échanges pour en finir avec les discriminations institutionnelles véhiculées, notamment, par l’École.
Q : Pouvez -vous nous expliquer comment est née cette initiative du Front des mères?
Diariatou Kebe: Nous avons lancé Front de mères d’abord pour nos enfants. Dès leur plus jeune âge ils sont stigmatisés. La “mauvaise” couleur de peau, la mauvaise texture de cheveux, la mauvaise religion, des parents qui parlent une autre langue, des parents avec un accent, l’histoire qu’on leur apprend sur leurs pays d’origines teintée de paternalisme et de condescendance et qui amènent à une haine de soi, une honte de soi et de ce qu’ils sont.
Les exemples sont malheureusement nombreux et entraînent une stigmatisation et des discriminations qu’ils subissent à l’école.
Nous avons souhaité nous organiser collectivement et politiquement à partir de l’existant pour mettre en place des réponses stratégiques mutualisées plus efficaces que les stratégies individuelles comme le choix des écoles privées, de l’assimilation ou de la nécessité de travailler deux fois plus et du fameux “quand on veut on peux “).
Q: En quoi va consister l’événement de ce mercredi 24 mai?
D.K: L’événement de demain est avant tout une journée d’échanges. L’organisation au niveau locale existe. Il s’agira dès demain de passer en mode “réseau”. C’est à dire de commencer à bâtir des stratégies communes à partir de nos expériences de parents.
Le tout avec un public composé de parents, de professionnels de l’éducation mais aussi des militants de terrain.
Les ateliers de travail à la suite des tables rondes ont pour objectif de parler de choses concrètes :
- Comment s’organiser pour assurer la réussite de nos enfants à l’école, comment s’assurer d’avoir une place en tant que parent à l’école ?
- Comment faire pour transmettre sa langue maternelle quand on ne la parle pas soi-même, où trouver des représentations positives et inspirantes pour nos enfants ?
- Comment s’organiser pour transmettre nos mémoires et nos luttes, dans quels espaces, avec quels outils ?
Des questions que tout parent est amené à se poser. L’idée c’est aussi et surtout montrer que les réponses sont là, que des personnes engagées, historiquement, ont des réponses à partager, des victoires et des bonnes pratiques à partager, et des freins à lever, etc.
Q: Sur quelles initiatives concrètes doit déboucher Front de Mères?
D.K: Historiquement les quartiers populaires se sont toujours mobilisés pour leurs enfants.
Aujourd’hui, nous devons ancrer ces luttes au niveau national en tant que parents et ainsi créer un rapport de force qui aura des relais au niveau local.
Ainsi l’organisation de collectifs locaux aura un poids politique non négligeable. Les initiatives seront annoncées à l’issue de la journée.
Ce temps d’échange ayant pour but principal de déboucher sur un plan d’actions concrètes en matière d’éducation et de transmission.
Propos recueillis par Nadia Henni-Moulaï
Infos pratiques :
Etats Généraux des Familles contre les discriminations à l’école
La Parole errante à La Maison de l’arbre
9 rue François Debergue, 93100 Montreuil
Diariatou Kebe, co-fondatrice du Front de mères, bloggeuse, Auteure de Maman Noire et Invisible, Ed. La Boite à Pandore (2015)
Fatima Ouassak, co-fondatrice du Front de mères, parent, militante anti-raciste